7 Prenons nos désirs pour des réalités


« Prenons nos désirs pour des réalités, croyons en la réalité de nos désirs. » Slogan de 1968 dans l’amphithéâtre de la Sorbonne. « Les chevaux du désir boiront l’eau des rivières sur les rives des ville envahies par les fleurs. » Raoul Vaneigem, Le livre des plaisirs.


Notes autour de Spinoza. Contribution au Salon des Esprits Libres de 2018 sur le désir.


Élan vital du désir

Désirer c’est être, signe de vie. Le désir active l’art vécu. Le désir est l’essence de l’homme et de toute chose, l’humanité même, pulsion vitale essentielle à la vie, condition nécessaire d'un bonheur positif et en mouvement. Premier effet de l’élan vital, fruit de notre volonté créative. Passer du « je pense donc je suis » au « je désire activement donc je deviens ce que je suis ».

Lacan conclut son Séminaire sur « L’éthique de la psychanalyse » par « ne pas céder sur son désir. »
Ne pas voir dans le désir qu’un manque, comme Platon et Schopenhauer, car le désir rend créatif, manifeste notre élan vital, désir de vivre, puissance.

« Chaque chose, autant qu’il est en elle, s’efforce de persévérer dans son être. » Conatus spinozien, puissance d’exister, énergie vitale, accroissement, joie. Désir dans la façon d’être et non but atteint, non rassasié et se renouvelant, signe d’intensité de la vie.

Désir, créativité, joie et bonheur et non souffrance

Désirons la vie que l’on possède et non ce qui manque, devenir ce que l’on est, persévérer dans son être. Le bonheur n’est pas seulement absence de souffrance, mais joie positive, augmentation de puissance, épanouissement que le désir active.
Les affects de joie augmentent notre puissance, les passions tristes, tristesse, haine, douleur, crainte, la diminuent. Pensé, hors de l’éthique, comme seul but à atteindre, à rassasier seulement, le désir serait morbide tourné vers le fini. Vivre c'est désirer la vie, être joyeux, heureux de posséder ce que l'on possède, considérer que la mort ne nous concerne pas.

L’éthique nous fait lier désir et joie, puissance et bonheur. Elle consiste à transformer les passions tristes en leur contraire, en désir de vie, de joie. Le gourmand peut devenir gourmet.

Le désir est porteur et créateur des valeurs, gai savoir, puissance, joie. Le désir d'une vie intense crée une vie intense. L’éthique fait du désir une puissance, une joie intérieure à la vie, un bonheur, pose des valeurs intérieures au désir de vivre lui-même et nie l'existence de valeurs transcendantes.
Nos affects négatifs doivent servir à vivre et non à nous détruire. L’éthique nous permet de saisir cette contradiction et les transforme en leur contraire, en désirs adéquats de joie et de bonheur. Désir porteur de notre être et des valeurs de joie et de bonheur à vivre transformant nos affects et passions tristes. Réguler le désir par la raison en opposant ses affects les uns aux autres, en les mesurant à la source de joie et de bonheur. Ne pas devenir l’esclave de nos passions.

Avec l’éthique, hors morale, la raison inscrit notre désir dans l’art vécu, le bon, l’utile, l’agréable, la joie, le bonheur, le bien vivre.

La servitude volontaire nie le désir quand la liberté le régule par la raison.