2 Légalisation contrôlée de la prostitution


Le marxisme indique combien les rapports économiques peuvent être déterminants. La psychanalyse combien les rapports de sexe peuvent jouer. Constatons combien sont grandes les interactions entre économie et sexe.

Une femme entretenue, ne travaillant pas par ailleurs, dans le mariage en général, est une femme achetée en tant que femme de ménage, que cuisinière, que partenaire de sexe, voire d’objet sexuel ou de punchingball, qu’éducatrice d’enfants, que partenaire de représentation et de liens sociaux.

Si le couple embauche une femme de ménage, une cuisinière, un précepteur pour les enfants, si le mari prend une maitresse, la femme sera délestée de telle ou telle tâche.

Ces situations vont déterminer un certain degré de prostitution de la femme maquée ou mariée. Ce degré sera moindre si la femme a une femme de ménage, un métier ou un amant.

Les hommes vont le plus souvent avoir des besoins et disposer d’un pouvoir financier pour acheter des prestations sexuelles aux prostituées ou entretenir des maîtresses, et des femmes vont vendre ces prestations. Cela peut s’inverser avec des femmes prenant amants ou gigolos, avec les transgenres dans des configurations multiples. Échangisme, voyeurisme et autres pratiques participent à la confusion, au grand bordel.

La prostitution reste principalement un rapport de subordination de femmes pauvres en position de faiblesse. D’autant qu’elle n’est pas légalisée contrôlée et est livrée au proxénétisme, au mercantilisme, à la violence et au bon vouloir des clients.


Les Esprits Libres souhaitent la limitation autant que faire se peut de la prostitution comme de tout esclavage salarié.

En ne reconnaissant plus le mariage civil, en éradiquant la misère par le versement du R.C., gage d’indépendance permettant aux femmes de vivre seules plus facilement, en instaurant la parité y compris au cœur du pouvoir à l’Assemblée nationale et dans les Conventions, pour la présidence elle-même alternée femme-homme, en organisant la légalisation contrôlée des drogues et d’autres secteurs dont l’immigration et son lot de prostitution étrangère clandestine, en développant prioritairement l’éducation, des femmes en particulier, en développant prioritairement la santé et le planning familial, en limitant le temps de travail, en favorisant la mobilité et la reconversion, en favorisant l’éros dans la cité, en développant poupées et jouets sexuels de substitution sophistiqués remplaçant les travailleurs du sexe, nous favoriserons une réduction considérable du phénomène prostitutionnel.

Par exemple les étudiantes de plus de 18 ans touchant un Revenu Citoyen pourront se passer de la prostitution.

Pour autant, si nous voulons limiter la prostitution comme toute activité de subordination salariée, si nous voulons supprimer le proxénétisme, le marché maffieux clandestin et la surexploitation capitalistique, si nous voulons préserver les bonnes conditions sanitaires, la santé publique et les libertés individuelles, il nous faut sortir de l’impasse de la prohibition et dépasser la libéralisation capitalistique du supermarché légal du sexe qui n’est guère satisfaisante.


Comme pour les drogues, la légalisation contrôlée est garante de baisse de la prostitution et le rêve fou de sa disparition n’est ni tenable, ni même souhaitable dans ses confins. Ce, même si elle devenait résiduelle dans notre société aux mœurs libres.

La légalisation contrôlée sera raisonnée au sein de coopératives de travailleurs et travailleuses du sexe ou d’entreprises individuelles légalisées. Légalisation contrôlée signifiant une publicité encadrée, des prestations protégées dans le souci sanitaire public, la limitation aux adultes, etc.


Préserver les libertés et lutter contre le proxénétisme et le marché clandestin

Les prostituées sont très majoritairement exploitées par le proxénétisme, réduites à des conditions de travail déplorables, non reconnues par le Code du travail et la société hypocrite qui les taxe pourtant, exposées aux maladies et aux drogues, et souvent poussées à la clandestinité.

Les clients sont aujourd'hui culpabilisés et pénalisés, victimes d'amendes et d'humiliation sociale. Pour casser l’exploitation, le trafic sexuel, le marché clandestin et les mafias nous devons proposer une autre politique que cette triste réalité.

Constatons aussi les limites des expériences de laisser faire du capitalisme, des Eros Center ou de la simple dépénalisation.


Sujet sensible exigeant un courage politique. Le sort réservé aux prisonniers, aux drogués et aux prostitués est à regarder à la loupe et les politiques doivent être jugés en fonction du sort qu’ils réservent aux plus démunis des citoyens. Le fait que nous concevions et souhaitions une société sans aliénation et sans exploitation ne doit pas nous empêcher d’aborder la réalité.

La bataille fait rage entre prohibitionnistes et réglementaristes et il nous faut renoncer à une position morale car le mot prostitution recoupe des réalités bien différentes.


Prenons en compte les chiffres désespérants publiés par la Commission européenne indiquant que 60 % du trafic d’êtres humains en Europe concerne le trafic sexuel dont 92 % des victimes sont des femmes ou des filles et 23 % des enfants. Ces esclaves sexuelles ne tirent pas de revenu décent de cette activité contrainte et viennent en priorité du Nigeria, de Roumanie, du Royaume-Uni, d’Albanie, du Vietnam...

Prenons également en compte les travailleuses du sexe indépendantes qui tirent un revenu, parfois confortable, d’une activité peu contrainte. Des essais évoquent des travailleuses sexuelles parfois libres et heureuses : « Balance ton corps », par Bertoulle Beaurebec, se veut un manifeste pour le droit des femmes à disposer de leur corps (Éd. La Musardine). « L’Utile et l’Agréable », par Maïna Lecherbonnier, évoque des mémoires d’escort girl (Éd. Blanche). « La maison », par Emma Becker raconte son expérience dans un bordel berlinois (Éd. Flammarion). « Vilaines Filles », par Pauline Verduzier (Éd. Anne Carrière). Et « Le putain de podcast » émission sur le travail du sexe où chaque épisode interviewe une travailleuse du sexe sur son parcours, sa vision du monde et de la prostitution.


Droits des travailleuses et travailleurs du sexe

L’OMS, l’Onusida et le Conseil national du sida considèrent que la pénalisation de la prostitution nuit à la santé des personnes prostituées mais notre Assemblée nationale, où les femmes et les minorités sont sous-représentées, s’en tient à assimiler la prostitution à une forme d'exploitation sexuelle.

Inefficaces sont les mesures sociales conditionnées à l’arrêt imposé de toute prostitution et si les droits de la personne prostituée, sa dignité et sa santé, ne sont pas respectés.

Ne confondons pas la lutte contre le proxénétisme et celle contre la prostitution où ses clients et ne considérons pas la prostitution comme phénomène uniquement féminin.

Considérons la multitude de prostitutions : celle du mariage bourgeois, de l’étudiante qui paie ses études, de l’escort-girl, du gigolo des bals, des marginaux, des professionnelles classiques indépendantes, des maquées aux proxénètes, des étrangères en situation irrégulière etc.

Que celles ou ceux qui n’ont jamais eu le fantasme de se prostituer pour de l’argent, pour un bien, voire pour le simple plaisir ou la curiosité de l’expérience, que ceux qui n’ont jamais eu, ou rêvé d’avoir, un rapport avec les personnes prostituées ou la prostitution, jettent la première pierre.

Ne limitons pas la marchandisation du corps humain à la seule prostitution quand le plus grand nombre de travaux salariés relèvent manifestement de cette catégorie. Considérons que le mariage partage, avec la prostitution, le souci de substituer à des rapports purement passionnels ou pulsionnels, l'idée plus civilisée de relations fondées sur un contrat.

Ce n’est pas parce qu’il y a dans la prostitution marginalisée et prohibée des pratiques condamnables qu’il faut chercher à interdire la prostitution. Le statut même de la prostitution provoque des pratiques condamnables. Il convient de légaliser en contrôlant pour limiter les risques et les effets néfastes.

Cessons d’infantiliser les personnes prostituées en affirmant qu’elles ne sont pas libres de leurs choix en prétendant savoir ce qui est bon pour elles. Cessons de vouloir soumettre leurs corps et leurs consciences. Cessons de nous ingérer dans leurs sexualités pour surveiller, canaliser et interdire, cessons de regarder en voyeurs.


Quatre grandes options s’ouvrent

- La situation actuelle inacceptable humainement.

- Le rêve fou de la société policière liberticide, de la prohibition et de l'abolitionnisme jamais réalisé car impossible et contre nature.

- La libéralisation marchande capitalisme des Eros Center.

- La légalisation contrôlée proposée par les Esprits Libres.


Organisons la légalisation autour de droits sociaux de base : couverture sociale, maladie, retraite et formation continue pour faciliter la réorientation de carrière pour ceux et celles qui le souhaitent. La police doit protéger les personnes prostituées dans leur travail et non de les pourchasser.

Le proxénétisme est à redéfinir en particulier afin de permettre aux personnes de louer, au prix du marché, des locaux pour travailler et qui leur permettent de s'associer entre elles.

Des concertations locales et nationales doivent élaborer des politiques publiques adaptées avec l'ensemble des partenaires concernés surtout les travailleuses et travailleurs du sexe. Inspirons-nous de politiques efficaces, Allemagne, Suisse, Autriche, Espagne, Nouvelle-Zélande, Australie.

Certains citoyens, femmes ou hommes, désirent choisir d’exercer librement professionnellement ou occasionnellement ce métier et respectons, protégeons et encadrons ce choix. Autorisons la prostitution dans des hôtels de passes agréés, dans des coopératives, en chambres affectées ou domestique pour les personnes vivant seules. Prohibons le proxénétisme.

Pour se prostituer légalement, il conviendra de résider légalement, d’avoir 21 ans, de déclarer cette activité, de suivre des stages d’information d’hygiène, de droit et de civisme et des visites médicales régulières. Publicités sur internet ou dans la presse exigeant un dépôt légal et une copie sur le site du centre de contrôle du racolage. Racolage sur la voie publique réglementé. Prostitution interdite dans les tentes, roulottes, camions et véhicules divers.

Rapports sans préservatifs interdits entraînant interdiction de pratiquer, fermeture de la maison ou de l’hôtel, saisie des biens, pénalisation clients-prostitués-tenanciers, amendes et procès pour mise en danger de la vie d'autrui. Agrément pour les maisons closes, hôtels de passes et leurs tenanciers. Police et le fisc ayant droit de faire des descentes et contrôles.

Dans les coopératives, la, ou le, prostitué(e) qui est professionnel(le) ou occasionnel(le), déterminera son temps de travail ne pouvant excéder 24 h par semaine à l’égal de tous les travaux sans qualification ou de grande pénibilité dans le programme des Esprits Libres. Les prostitués choisissent leurs clients sans obligation ni pression. Interdiction des « pass » donnant accès à plusieurs ou tout(e)s les prostitué(e)s d’une maison. Rapport des passes partagés avec au minimum la moitié à la personne prostituée. Les hôtels de passes servant jour et nuit à la légalisation contrôlée comme aux couples non prostitués. Chambres louées à qui veut et impôt prélevé sur la location de la chambre.


La légalisation contrôlée de la pornographie

La consommation de pornographie est aussi considérable que l’est la critique de celle-ci. Une consommation qui n’implique pas la violence et les films pornographiques ne sont pas forcément violents. Art et pornographie ne sont pas antinomiques et la consommation du pornographique peut avoir du bon.

Veillons en particulier à ce qu’il n’y ait pas de dégradation des femmes, à la protection de la jeunesse, à ce qu’il n’y ait pas d’atteinte à autrui. Généralement les pro-porno sont démocrates, tolérants et laïques quand les antis sont moralistes et religieux, intolérants, intégristes et non laïques. Les pays de plus grande tolérance du pornographique sont les pays de plus grande liberté. Les images et écrits érotiques et pornographiques ne sont pas bons dans les salons bourgeois et mauvais s’ils sont démocratiques et de masse. Ne pas nier, ne pas cacher, ne pas réprimer. Cessons l’hypocrisie consistant à consommer en se cachant. Arrêtons la répression, le classement X des films et la TVA surtaxée. Considérons que la primauté de l’être est engagée dans l’érotisme et la pornographie.