14 Leurre de la démocratie participative

Démocratie participative, le pire et le meilleur
Nous concevons la 6ème République comme une démocratie vivante délibérative, représentative et citoyenne. La participation citoyenne est à considérer dans toutes ses dimensions.
La citoyenneté était un métier à Athènes. Le citoyen est responsable de la politique, organisation de la cité. Son expérience quotidienne et ses engagements culturels, associatifs, professionnels, familiaux et autres lui confèrent un bon sens, un savoir d’usage, une expérience et une expertise que la collectivité doit mettre à profit. Les projets citoyens associatifs et alternatifs naissent et doivent être soutenus.
Cette expertise et ces projets enrichissent le débat et éclairent les décisions autant que les experts traditionnels culturellement déterminés, trop souvent partisans ou affiliés à des intérêts économiques ou sociaux ou des logiques bureaucratiques et financières à court terme.
Concernant la démocratie locale et la démocratie participative, les Esprits Libres s’inspirent de réflexions et propositions de Marion Paoletti, enseignante à Bordeaux.

Le pire :
De la complexité
On préfère aujourd’hui la représentation et la délibération mûrie et longue à la participation car en raison du rythme, de la croissance, de la technicité des décisions à prendre en fait seule une minorité de citoyens, retraités et militants surtout, participe et seuls des petits groupes ou des exceptions atteignent le niveau de professionnalisation des politiques. Ces minorités tendent à rejoindre la politique professionnelle et les procédures participatives à dériver vers le clientélisme et le lobbying.
De la démagogie
Fourre-tout de la pensée, leurre, miroir aux alouettes, l’appel à la démocratie participative dans le cadre de la 5ème République est souvent mollesse et tromperie. Sur le terreau du désengagement politique et syndical, Il y a souvent dans l’apologie de la démocratie participative un renoncement plutôt qu’une perspective d’engagement citoyen. Le dispositif de participation est instrumenté par le pouvoir en consultations alibis et le citoyen n’est associé, ni à la délibération, ni à la décision.
La pente, participative, directe, référendaire
Le pire est la démocratie référendaire chère aux extrémistes démagogues populistes de gauche et de droite. Le référendum devient la méthode de gouvernement, espèce de démocratie directe passionnelle, médiatique, sondagière, populiste, néofasciste, démagogique, manichéenne, braderie et caricature de la démocratie.

Le meilleur :
La dimension participative de la démocratie représentative n’a de sens qu’intégrée à une vision globale et ne saurait faire l’économie d’une nouvelle République afin de sortir de la participation infantilisante et technocratique de la 5ème République.
C’est le développement d’une culture civique et participative qui multiplie les situations où les citoyens jouent un rôle actif. L’élu met en œuvre la délibération et la légitimité de la décision politique dépend largement de la procédure qui la produit.
La participation des citoyens ne remet pas en cause la représentation et le travail des élus. Une bonne représentation vaut mieux qu’un leurre de participation.
La démocratie représentative ne doit pas être un quatrième pouvoir aux cotés du législatif, de l’exécutif et du judiciaire. Elle consiste à donner un caractère citoyen à ces pouvoirs.
Le dispositif :
Il s’agit de rendre vivants les dispositifs existant en évitant d’en ajouter : les budgets participatifs, les cours des comptes nationales et régionales, les conseils de développement dans les conseils d’agglomération et de pays, les conseils de quartier dans les grandes villes, ateliers d’habitants, commissions extra municipales, conseils municipaux de jeunes, etc. Il s’agit de renforcer le pouvoir des citoyens, en garantissant l’égalité dans l’accès à l’information et les échanges entre citoyens, experts et élus. Il s’agit d’alléger, simplifier, rendre durable la participation citoyenne hors des gadgets, de la manipulation, du populisme, de la propagande électorale, des sondages et des comités inutiles.
Démocratie locale, la France mauvaise élève de l’Europe
En Europe, la démocratie participative s’expérimente et les pouvoirs locaux évoluent vers plus de clarté et plus de responsabilité. Tendance européenne au non cumul, à l’élection directe du maire, à des équipes collégiales de direction. En Europe, le maire et parfois les adjoints, ne siègent pas forcément dans le conseil qui est indépendant, contrôle et propose.
En France nous constatons la stagnation démocratique, la démocratie délibérative en voie d’extinction et une démocratie locale indifférente au contexte européen.
Morcellement en 90 départements inutiles et plus de 36 000 communes
5ème République, démocratie confisquée en trompe l’œil, contraire d’une démocratie vivante.
Cumul des mandats locaux et nationaux. Notabilisation et vieillissement du pouvoir.
Exécutifs locaux ultra-présidentialisés. Statut et fonction des maires, élus au second degré, mimant le présidentialisme généralisé de la 5éme République.
Concentration des fonctions et pouvoirs exécutifs et délibératifs, maire irrévocable tout puissant, chef du Conseil municipal, chef des adjoints qu’il nomme et révoque.
Conseil corseté par le maire et ses adjoints. Opposition peu représentée, dose de proportionnelle et statut de l’élu négligeables.
Deuxième, voire troisième, degré électif, la coopération intercommunale achève de dépolitiser la gestion locale. Budgets et attributions des compétences opaques doublant les administrations communales.
Le citoyen dépossédé de la démocratie n’identifie pas les complexes niveaux administratifs. Il n’utilise guère les commissions extramunicipales et les conseils de quartiers et se détourne des élections.